Le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) est une obligation réglementaire pour toutes les entreprises, quel que soit leur secteur ou leur effectif. Véritable colonne vertébrale de la démarche de prévention, il permet d’identifier, d’évaluer et de hiérarchiser les risques auxquels sont exposés les salariés. Au-delà du simple cadre légal, bien rédiger son DUERP, c’est structurer sa politique de prévention, réduire les accidents du travail et améliorer durablement la santé et la sécurité au sein de l’entreprise.
Dans cet article, nous vous expliquons concrètement ce qu’est le DUERP, qui est concerné, ce qu’il doit contenir et comment le rédiger pas à pas, avec des ressources officielles pour aller plus loin.
Qu’est-ce que le DUERP ?
Définition
Le DUERP est la transcription écrite des résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs. Il s’agit d’un inventaire par « unité de travail » des risques identifiés, assorti d’une hiérarchisation et d’un plan d’actions.
Il ne s’agit pas d’un simple formulaire : le DUERP est un outil dynamique, évolutif, servant à orienter les actions de prévention et à assurer la traçabilité dans le temps.
Cadre légal et obligations de l’employeur
Le DUERP découle des obligations générales de l’employeur décrites dans le Code du travail (notamment les articles L. 4121-1 et suivants).
En particulier, l’employeur doit « prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (principe général de prévention) ; l’évaluation des risques en est une composante essentielle.
Le non-respect (absence de DUERP ou non mise à jour) peut entraîner des sanctions, comme une amende pour contravention de 5ᵉ classe ou un délit d’entrave si le document n’est pas accessible aux instances.
Le DUERP doit être transmis aux agents du service de prévention et de santé au travail (SPST) lors de sa mise à jour, et le CSE doit être consulté (le cas échéant).
À noter : la réglementation n’impose pas de modèle rigide ou de mention obligatoire (date, signature, etc.), mais en pratique il est recommandé de dater chaque version pour assurer la traçabilité.
Le DUERP doit être mis à jour :
- Au minimum chaque année pour les entreprises de 11 salariés ou plus.
- Lorsqu’une modification significative intervient (nouveau matériel, réorganisation, changement des conditions de travail, nouveaux risques identifiés…).
- Lorsqu’une information nouvelle permet d’identifier un risque non pris en compte antérieurement.
Enfin, les versions successives du DUERP doivent être conservées pendant 40 ans.
Qui est concerné par le DUERP et qui le rédige ?
Entreprises concernées
Le DUERP est obligatoire dans toute entreprise dès l’embauche du 1ᵉʳ salarié. Il n’y a pas de seuil minimal. Cela inclut les secteurs industriels, tertiaires, de services, le commerce, etc. Le contenu spécifique variera selon les risques du secteur.
En pratique, les obligations (mise à jour annuelle, mesures de formalisation) sont plus contraignantes pour les entreprises de 11 salariés et plus.
Acteurs impliqués dans la rédaction
Même si la responsabilité ultime revient à l’employeur, plusieurs acteurs peuvent et doivent être associés :
- Le Comité Social et Économique (CSE) : il doit être consulté sur l’élaboration et la mise à jour du DUERP et sur le plan d’actions.
- Le service de prévention et de santé au travail (SPST) : il peut apporter son expertise, être destinataire du DUERP et participer à la démarche de prévention.
- Le ou les salariés compétents désignés par l’employeur pour les activités de protection et prévention des risques (en particulier dans les PME).
- Le direction / management (chef d’entreprise, responsable qualité sécurité, etc.) : il est essentiel qu’il affiche sa volonté, mette les moyens et impulse la démarche.
L’approche de la rédaction doit être collective et concertée, s’appuyer sur le dialogue social, pour favoriser l’appropriation par les équipes.
Ce que doit contenir le DUERP
Il n’existe pas de modèle unique imposé par la réglementation, mais le code du travail et l’INRS définissent plusieurs éléments qui doivent être présents ou considérés.
Nous vous proposons une structure et les contenus essentiels à inclure :
Quelques compléments importants :
- Il est recommandé de dater chaque version, même si la loi ne l’impose pas strictement.
- Le DUERP doit permettre de regrouper les données de manière cohérente, pour faciliter le suivi de la démarche de prévention dans le temps.
- Si l’entreprise est soumise à des obligations de pénibilité (expositions à des facteurs définis dans le Code du travail), des données collectives doivent être annexées pour faciliter la déclaration.
- Le DUERP doit être accessible aux personnes concernées (salariés, instances représentatives, inspecteurs, agents de contrôle).
Méthode pour rédiger le DUERP
Étape 1 — Préparer la démarche
Désigner le pilote (référent prévention, responsable RH, SST, prestataire externe) et composer l’équipe (manager, salariés représentatifs, éventuellement médecin du travail ou ergonome).
Définir le périmètre : établissement entier / site / département / unité de travail.
Étape 2 — Recenser les unités de travail
Une « unité de travail » = groupe homogène de postes avec mêmes activités/expositions (ex. : production nuit, bureau, livraison). Cela facilite l’inventaire et la comparaison.
Étape 3 — Identifier les dangers et sources d’exposition
Relever tâches, procédés, équipements, produits, postes, ambiances (bruit, températures), organisation du travail, situations de stress ou pénibilité. Utiliser observations de poste, entretiens, registres d’accidents, fiches de données de sécurité (FDS).
Étape 4 — Évaluer / hiérarchiser les risques
Choisir une méthode simple et partagée (probabilité × gravité, scores 1–5, matrices, ou outils OiRA pour TPE). L’objectif : prioriser les actions.
Étape 5 — Définir le plan d’actions
Pour chaque risque prioritaire : action(s) (technique, organisationnelle, formation, équipements de protection), responsable, moyens nécessaires, échéance, indicateur de résultat. Privilégier la suppression/maîtrise à la source puis les mesures collectives avant les protections individuelles.
Étape 6 — Formaliser et communiquer
Rédiger le DUERP (format numérique recommandé pour traçabilité), joindre annexes utiles (fiches de prévention, analyses détaillées), et rendre le DUERP accessible aux salariés (intranet, affichage, consultation RH).
Étape 7 — Mettre à jour et mesurer l’efficacité
Actualisation annuelle et obligatoire après tout changement significatif. Suivi des indicateurs d’avancement du plan d’actions, retours terrain et revue post-action.
Outils pratiques et ressources officielles qui peuvent vous aider
- INRS — rubrique Document Unique / méthode et fiches pratiques : bonnes pratiques, exemples, aide-mémoire.
- Ministère du Travail — fiche et obligations sur le DUERP (explications juridiques et textes).
- Ameli / Assurance Maladie — outil en ligne gratuit pour réaliser son DUERP (outil d’évaluation des risques) : utile aux TPE/PME pour diagnostiquer et générer un DUERP initial.
- ANACT — guides méthodologiques et fiches (ex. : évaluation différenciée, ergonomie, organisation) : pour intégrer QVCT, égalité F/H, et facteurs organisationnels.
Bonnes pratiques et recommandations opérationnelles
- Associer les salariés et représentants : la réalité des postes vient du terrain ; leur implication augmente l’adhésion aux mesures.
- Ne pas confondre document et démarche : l’objectif est la prévention effective ; le DUERP est l’outil qui doit déclencher des actions.
- Adapter la méthode à la taille de l’entreprise : TPE = outils simplifiés (questionnaires, OiRA) ; grandes structures = cartographies plus fines, indicateurs, tableaux de bord.
- Traçabilité : conserver versionning, comptes rendus de réunions et preuves des actions réalisées (factures, attestations, PV).
- Penser à la prévention tertiaire : suivi des expositions et adaptation des postes au retour d’arrêt, maintien en emploi, ergonomie.
Checklist : ce qu’il faut insérer dans un DUERP opérationnel
- En-tête : établissement, N° de version, date.
- Périmètre et unités de travail.
- Méthode d’évaluation utilisée.
- Tableau risques par unité : risque, source, personnes exposées, cotation, action recommandée, responsable, délai, statut.
- Plan d’actions consolidé.
- Annexes : fiches postes, analyses détaillées, comptes-rendus.
- Historique des mises à jour.
Pourquoi soigner votre DUERP ?
Un DUERP bien rédigé est à la fois une obligation réglementaire et une véritable feuille de route pour la prévention. Il permet d’identifier les priorités, d’affecter des ressources, d’améliorer la QVCT et de réduire accidents et souffrances au travail. Utilisé comme un outil dynamique, il valorise aussi l’engagement de l’employeur et favorise le dialogue social.










